C’est l’une des sagas les plus connues : la Saga de Snorri le Godi. Snorri est un personnage retors, sournois, mais d’une intelligence extraordinaire. Il est à cheval, en route pour un rendez-vous, lorsque sur son chemin apparaît une tête de femme qui lui déclame une strophe scaldique et lui dit :
- "N’y va pas, c’est un piège."
Il l’écoute et rebrousse chemin. La femme avait raison, il y avait un piège.
Ce passage est le symbole du réalisme magique à l’islandaise. Il n’y a pas de réalité, pas de réel : les Islandais d’aujourd’hui comme d’autrefois sont dans une réalité hantée, surnaturelle. Le réel en Islande ne correspond pas à la réalité que l’on en a ailleurs, notamment en France.
Ancré dans la société
Pour les Islandais, le magique est une notion bien réelle. Croire aux elfes, détourner les routes pour protéger leurs habitats ou les esprits des morts, ne relèvent pas du fantastique mais bien du réel. La frontière est tellement mince et le magique tellement ancré dans la réalité islandaise qu’une grande partie des auteurs islandais peut se réclamer de ce mouvement.
Deux exemples avec Sjón qui, sous fond de génocide juif, fait d’un petit garçon d’argile son narrateur. Dans un début de XXème siècle rude, l’héroïne de "Karitas, Sans titre", de Kristín M. Baldursdóttir, est attaquée par cinq femmes maléfiques et protégée dans ces rêves par un homme elfe. La liste est longue. Chacun de ces écrivains décrit une réalité autre que celle que nous connaissons. Pour Sjón, le réalisme magique n’existe pas en Islande. Ce n’est qu’une étiquette apposée sur les auteurs par les critiques littéraires. Même s’il avoue s’être inspiré de ce courant né en Amérique du sud, avec comme fer de lance Gabriel García Márquez.
L’influence des sagas et des sud-américains